Apports et conclusions sur les aspects liés au besoin de structure

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Le besoin de structuration des horaires de travail diminue lorsque les travailleurs sont préoccupés par d’autres choses que celles de la tâche à réaliser (plus de la moitié du temps de travail). On pourrait interpréter cela de deux manières, sous la forme de deux hypothèses :

  1. Lorsque que la tâche à réaliser est plaisante, le travailleur est dans son flow (Csikszentmihalyi, 2004) avec de la place pour penser à autre chose, et a donc nettement moins besoin de structure dans son horaire de travail.
  2. Lorsque que la tâche à réaliser est ennuyeuse (n’a pas de sens pour lui), le travailleur doit se concentrer et le besoin de structure de l’horaire de travail diminue. 

D’autre part, pour diminuer l’impression « du temps qui passe lentement au travail », les sondés (à 58.9%) expriment un besoin d’avoir de l’autonomie sur la structure de leurs horaires de travail (Plutôt non / Non, ce n’est pas nécessaire, je structure mes horaires tout seul).

A l’inverse, ils sont 41,1 % à penser que c’est « nécessaire » (Tout-à-fait, c’est indispensable / Plutôt oui) d’avoir de la structure dans l’horaire de travail, pour ne pas avoir le sentiment du temps qui passe lentement.

Les « Employés » sont plus nombreux que les « Dirigeants » à ressentir le temps qui passe lentement. Cela peut s’expliquer par un mélange d’ennui dit « de situation » généré par la monotonie du travail à réaliser et l’ennui de « disposition », directement lié à une disposition naturelle à l’ennui. Neu parle de restrictive boredom et d’endogenous boredom (Neu, 1998), Mercer Lynn et al. de situation-based state boredom et de person-based state boredom (Kimberley, Mercer-Lynn , Bar, & Eastwood, 2014). 

S’agissant des séances de travail, 80.2% des personnes interrogées ressentent de l’ennui durant les réunions professionnelles contre seulement 19.8% des sondés, qui déclarent ne jamais s’ennuyer.

Ces 80.2% se décompose comme suit : 

  • 37.1.%, les sondés expriment ressentir de l’ennui pendant plus de la moitié de la séance professionnelle (Oui, tout le temps / souvent (durant presque toute la séance de travail / Assez souvent (environ la moitié de la séance de travail)
  • A 43.1%, les sondés disent ressentir de l’ennui durant moins de la moitié de la séance (Rarement (1 à 2 heures par séance de travail)). 

De manière générale, seuls 12.4% des sondés déclarent se retrouver « sans rien à faire » devant eux, ce qui semble indiquer que les horaires de travail des sondés sont bien structurés.

Toutefois lorsque l’on compare entre les catégories « Employés » et « Dirigeants », une importante différence apparaît, puisque 21.1 % des « Employés » (contre 2.1% pour les « Dirigeants ») déclarent se retrouver sans rien faire (avec du temps devant eux). Ce résultat indique clairement que la charge de travail « dans le temps » est mieux connue pour le groupe de « Dirigeants », avec probablement une vision à long terme, alors que le groupe « D’exécutants » doit vraisemblablement attendre sur un ordre et/ou qu’une autre partie du travail soit terminée, avant de pouvoir continuer leurs tâches.

Toujours à ce sujet, il semble que les « Juniors » se retrouvent nettement plus souvent que les « Seniors » avec du temps devant eux, sans rien faire (+24.2%). Il est possible que les « Seniors », grâce à leur expérience du métier, connaissent mieux le sens de la tâche et peuvent anticiper les prochaines actions. Il est également probable que la latitude de décision plus forte pour les Seniors, leur permet de littéralement enchaîner les divers travaux successifs. Quant aux « Juniors », il est réaliste d’imaginer qu’ils doivent attendre un ordre, ou qu’ils soient bloqués par un processus qu’ils ne maitrisent pas. 

Toujours en rapport avec la structuration du temps, et s’agissant de la charge de travail, 55.4 % des sondés estiment avoir trop de travail, contre 44.6 % (Plutôt non et non). Parmi ceux qui estiment avoir trop de travail, 26% peuvent hypothétiquement avoir besoin de plus de structure dans leurs horaires de travail pour soulager cette sensation et 30% pensent que cela ne vient pas de la structure de leur horaire de travail.

Parmi les 44,6% qui estiment ne pas avoir trop de travail, 15% pensent que la structure de travail est nécessaire et adéquate et 29 % penchent pour le contraire. 

Parmi le groupe de « Dirigeants » 69.9 % estiment avoir trop de travail alors que dans le groupe « D’exécutants », seuls 42.6 % le pensent. Il n’est pas clairement établi que cette sensation « de trop de travail » représente des heures supplémentaires, toutefois je partirais sur cette hypothèse, dans la mesure où le travail réalisé dans le temps contractuel ne représente pas une sensation « de trop travailler ». Une autre hypothèse pourrait être relative à la rapidité de travailler. Autrement dit, lorsque l’on a trop de travail, une accélération du processus permettrait d’absorber la quantité de travail dans le même laps de temps. Conséquemment, on peut en déduire que les « Dirigeants » (près de 70%) réalisent une partie du travail que l’organisation ne peut pas absorber dans le cadre contractuel, soit sous forme d’heures supplémentaires, soit sous forme d’accélération des processus. Les « Employés » assument également leur part à hauteur de 42.6%. Outre le facteur lié à la quantité de travail, on peut imaginer l’hypothèse qu’un manque de structure dans l’horaire de travail génèrerait cette sensation d’avoir trop de travail. 

64.7% des « Seniors » estiment avoir trop de travail par rapport à la catégorie « Juniors » (+ 22.3 %. Voici quelques hypothèses à retenir :

  • La charge psychologique liée aux responsabilités qui reposent sur les épaules des « Seniors » empêche le partage du travail. Ceci pourrait être en lien avec les drivers « Sois Fort », « Sois Parfait » ou même « Dépêche-toi »(Berne, 2016),  avec les difficultés sous-jacentes de montrer leur vulnérabilité aux « Juniors ».
  • Au niveau social, et en relation avec les positions de vie +/- (Berne, 2016), Il se peut que les « Seniors » n’aient pas confiance (Sois Fort) que le travail soit assez bien fait (Sois Parfait), voire assez vite fait (Dépêche-toi)
  • Au niveau psychologique, que se passe-t-il dans l’esprit des « Seniors », si les « Juniors » réussissent mieux ou plus vite que moi ?
  • Une partie des tâches réalisées par les « Seniors » est structurée avec « un début, un milieu, une fin », ce qui empêche potentiellement une bonne délégation. C’est dans le domaine des expériences « renforçantes » du type : « on a toujours fait comme cela » qu’il faut peut-être y chercher une explication. (Circuit du sentiment parasite) (Berne, 2016)
  • La méconnaissance d’options chez les « Seniors », pour exécuter le travail différemment, ou d’une autre manière.
  • La hiérarchie impose une pression psychologique avec des messages contraignant de type « fait effort », avec des difficultés sous-jacentes à pouvoir simplifier la tâche. (Drivers AT) (Berne, 2016)
  • Cher les « Seniors », le « pinaillage » peut également être considéré comme un jeu de pouvoir. Et du point de vue des préférences de comportement, on peut également y voir une incompréhension, voire une mécompréhension, de faire mal, différemment ou encore, sans respecter les directives. 

Quant à la catégorie des « Femmes », elle estime à plus de 11.6 % avoir trop de travail par rapport à la catégorie « Hommes ». Comme indiqué à plusieurs reprises, il est difficile de poser des hypothèses, sans se lancer dans une nouvelle recherche. Toutefois, afin d’en savoir plus, en extrayant de la base de données uniquement les « Dirigeants » des catégories « Hommes» » et « Femmes », on constate que la différence se creuse encore et amène les hypothèses suivantes : 

  • Les femmes ont une charge psychologique, liée à leurs responsabilités de leaders, supérieure aux hommes.
  • La pression psychologique de la hiérarchie renforce le driver « fait effort ». (Berne, 2016)
  • Une autre hypothèse résiderait dans le manque de soutien des hommes envers les femmes, sous une forme de compétition. Ici, il s’agirait du driver « sois parfait » qui serait en jeu : autrement dit, (du point de vue des hommes) si je ne te soutiens pas, tu vas faire des erreurs et inversement, (du point de vue des femmes) tu verras que je ne ferai pas d’erreurs. Je ne rentre volontairement pas dans des explications liées à d’éventuels jeux psychologiques, car tel n’est pas le propos. En revanche, tout spécialiste qui lira ces lignes en tirera les hypothèses sous-jacentes. (Berne, 2016)
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