Apports et conclusions – Perception de l’ennui et préférences de comportement

Observation et hypothèses pour la question Q32 : actuellement vous diriez que vous travaillez dans vos préférences de comportement ? 

De manière générale, les personnes interrogées ont pu s’exprimer sur l’impression qu’elles avaient de travailler dans leurs préférences de comportement, telles qu’elles sont nommées et décrites par Leonardo3.4.5 (Vaucher & Muth, 2020). 

Avant d’analyser en détail les réponses et d’en tirer des hypothèses, il convient d’essayer de percer le mystère du mécanisme psychique, qui s’est mis en œuvre pour répondre à cette question. Tout d’abord, il semblerait qu’il n’y ait pas de progrès possible et/ou de possibilité de s’améliorer, sans un important travail de questionnement. Chacune et chacun a pour habitude depuis sa plus tendre enfance de se questionner dans le but de réduire l’incertitude. Se poser les bonnes questions semble faire avancer vers des objectifs avec une forme de garantie. A la fin du XIXe siècle, et provenant de Londres, le questionnement était un divertissement sulfureux et néanmoins prisé dans les « salons ». Antoinette, la fille du future Président Félix Faure[1], s’adonnait à ce jeu permettant de découvrir un peu plus l’inimitié du « moi ». Parmi ses invités, figurait Marcel Proust[2], qui révéla une partie de sa personnalité en répondant au carnet de jeu acquis par Antoinette, et c’est ainsi que naquît le fameux questionnaire éponyme (Bellenger & Couchaere, 2018).

Plus proche de nous, on retrouve des livres sur « l’auto-questionnement », tel « Le livre des questions » de Gregory Stock. Celui-ci, tiré à plus de 2,5 millions d’exemplaires et traduit en quinze langues, pose plus de 300 questions faussement simples et qui invitent à explorer une multitude de sujets sur « soi » (Stock, 2014).

Einstein a quant à lui déclaré dans un de ses ouvrages : « Si j’avais une heure pour résoudre un problème dont ma vie dépend, je passerais les 55 premières minutes à chercher la meilleure question à me poser et lorsque je l’aurais trouvée, il me suffirait de 5 minutes pour y répondre » (Einstein, 1934). Cela démontre l’importance de la mise en question pour obtenir une bonne réponse.

Ainsi, il est non seulement de coutume de se poser des questions, mais également habituel d’y répondre. On peut donc affirmer sans trop prendre de risque, que les interviewés ont pu répondre à la question posée en s’auto-interrogeant :

  1. S’ils travaillent ?
  2. Actuellement ?
  3. Dans leurs préférences de comportement ?

Puis, on peut imaginer que leurs réflexions se sont étendues sur le sens de la question, à savoir :

  • Qu’elle est leur première préférence au travail (fonction Leonardo3.4.5) ?
  • A combien de pourcent, ils travaillent actuellement dans cette préférence ? 

Cette question de type allocentrisme, aide les interviewés à faire des projections, qui leur permettent de formuler des réponses mêlant une bonne connaissance de soi et une bonne interprétation des contextes et des situations professionnelles. 

La description des profils de personnalité selon Leonardo3.4.5 

Afin de comprendre comment les interviewés peuvent faire des liens entre la question posée et le sentiment de travailler dans leurs préférences de comportement, il est utile de préciser qu’un descriptif des fonctions et des préférences de comportement a été livré à chaque personne interrogée, sous la forme d’un rapport, nommé rapport « développement ». 

Les rapports « développement » Leonardo3.4.5 sont édités en 1536 combinaisons de profils différents et sont disponibles dans chacune des langues suivantes : anglais, français, allemand, néerlandais et italien. Ils décrivent les comportements préférés et fournissent des orientations pour le travail d’équipe et le développement de l’intelligence collective (Vaucher & Muth, 2020). 

Bien sûr, un générateur de profils, quelle que soit sa précision, n’est qu’une machine triviale, qui ne sera jamais en mesure de décrire toute la complexité des êtres humains. Néanmoins, et comme démontré dans le chapitre « validité de convergence » de cette recherche, environ 97% des participants ont validé le contenu de leurs profils Leonardo3.4.5. 

Les profils sont équipés « d’aides à l’apprentissage et au changement”, inspirés de F. Vester, et ils tiennent compte de la « mécanique » de la mémorisation et du temps nécessaire pour achever le processus de création d’alternatives comportementales disponibles instantanément. La biologie d’apprentissage a été à la base de la technique de rédaction des textes des profils (Vester, 1984). 

On peut en déduire que, la pertinence des profils Leonardo3.4.5 et l’excellent taux d’acceptation de ceux-ci, conjugués au temps nécessaire au processus de mémorisation, a permis aux interviewés d’auto-valider la bonne représentation des préférences de comportement, proposée au travers du descriptif de chacune des huit fonctions. 

Enfin, et à toutes fins utiles, un descriptif de ces huit fonctions (information, innovation, promotion, développement, organisation, réalisation, vérification, stabilisation) issues des profils de personnalités Leonardo3.4.5 est disponible ici

Méthode de recherche spécifique 

Afin de tenter de déterminer de quelle manière les personnes sondées ont perçu l’ennui en fonction du temps passé dans leurs préférences de comportement, je vais procéder de la manière suivante : 

  1. Analyse générale par tableau croisé entre la perception de l’ennui et le temps passé à travailler dans ses préférences de comportement.
  2. Comparaison avec les valeurs témoin de la perception de l’ennui.
  3. Comparaison par fonction :
    1. Information
    2. Innovation
    3. Promotion
    4. Développement
    5. Organisation
    6. Réalisation
    7. Vérification
    8. Stabilisation

Validité de l’échantillon 

Afin de s’assurer du degré de validité de l’échantillon de 201 personnes interviewées sur leurs préférences de comportement, j’ai extrait un échantillon de 3808 personnes de la base de données Leonardo3.4.5, dans le but de les comparer : 

 

Fréquence

échantillon

référence

Pourcentage échantillon référence

Fréquence

échantillon recherche

Pourcentage échantillon recherche

Différence entre les 2 échantillons

DEVELOPPEMENT

491

12.9%

22

10.9%

-1.9%

INFORMATION

341

9.0%

18

9.0%

0.0%

INNOVATION

577

15.2%

59

29.4%

14.2%

ORGANISATION

769

20.2%

37

18.4%

-1.8%

PROMOTION

484

12.7%

28

13.9%

1.2%

REALISATION

765

20.1%

25

12.4%

-7.7%

STABILISATION

126

3.3%

5

2.5%

-0.8%

VERIFICATION

255

6.7%

7

3.5%

-3.2%

Total

3808

100.0%

201

100.0%

0.0%

Figure 110 – Tableau comparatif entre échantillon et fréquence 

L’échantillon issu de la recherche est relativement proche de l’échantillon de référence, sauf pour 2 fonctions :

  • Pour la fonction « Innovation » : L’échantillon est sur-représenté de 14.4%
  • Pour la fonction « Réalisation » : L’échantillon est sous-représenté de -7.7%%

Les autres « fonctions » oscillent entre -3.2% + 1.2 % et sont suffisamment proches de l’échantillon de référence, pour pouvoir être retenues comme valables. 

Je tiendrais compte de ce différentiel, lors de mes observations sur ces 2 fonctions.

Observations et hypothèses :


 

Dans le tableau ci-dessus, on constate clairement que plus on travaille dans ses préférences de comportement, moins on perçoit l’ennui.

On remarque distinctement que les deux courbes (en bleu = je ne perçois jamais de l’ennui et en orange = je m’ennuie moins de la moitié du temps de travail) ont une tendance évidente à augmenter, et cela de manière plus manifeste pour la courbe bleue.

A contrario, moins on travaille dans ses préférences et plus les personnes interviewées déclarent ressentir de l’ennui au travail ; on observe la courbe grise progresser de manière inverse.

 

·      Pour le groupe de personnes déclarant « Ne jamais s’ennuyer », plus ils travaillent dans leurs préférences, moins ils ressentent de l’ennui (+15.3%)

·      Pour le groupe de personnes déclarant « S’ennuyer moins de la moitié du temps », plus ils travaillent dans leurs préférences, moins ils ressentent de l’ennui (+8.6%)

·      Pour le groupe de personnes déclarant « S’ennuyer plus de la moitié du temps », plus ils travaillent dans leurs préférences, moins ils ressentent de l’ennui (-24 %)

 

Comparaison avec les valeurs témoins

 

Travailler entre 75% et 100% du temps dans ses préférences de comportement permet de se retrouver moins souvent dans des situations où l’on perçoit de l’ennui :

 

Je m’ennuie :

Jamais

Je m’ennuie :  moins de la moitié du temps de travail

Je m’ennuie : plus de la moitié du temps de travail

 

Travail entre 75 – 100 % dans ses préférences

23.0%

51.1%

25.9%

100.0%

Valeurs témoins (perception de l’ennui)

17.1%

50.0%

32.9%

100.0%

 

 

Travailler entre 50% et 75% du temps dans ses préférences de comportement permet de se retrouver à quasi-parité avec la valeur témoin :

 

Je m’ennuie :

Jamais

Je m’ennuie :  moins de la moitié du temps de travail

Je m’ennuie : plus de la moitié du temps de travail

 

Travail entre 50 -75 % dans ses préférences

15.7%

52.7%

31.6%

100.0%

Valeurs témoins (perception de l’ennui)

17.1%

50.0%

32.9%

100.0%

 

 

Travailler moins de 50% du temps dans ses préférences de comportement indique augmenter la perception de l’ennui au travail (excepté pour la colonne moins de la moitié du temps de travail) :

 

 

Je m’ennuie :

Jamais

Je m’ennuie :  moins de la moitié du temps de travail

Je m’ennuie : plus de la moitié du temps de travail

 

Travail entre 0-25% dans la préférence

7.7%

42.5%

49.9%

100.0%

Travail entre 25 – 50 % dans ses préférences

8.2%

48.5%

43.3%

100.0%

Valeurs témoins (perception de l’ennui)

17.1%

50.0%

32.9%

100.0%

 

 

[1] Félix Faure, né le 30 janvier 1841 à Paris et mort le 16 février 1899 dans la même ville, est un homme d’État français. Il est président de la République du 17 janvier 1895 à sa mort (source Wikipedia).

[2] Marcel Proust, né le 10 juillet 1871 à Paris où il est mort le 18 novembre 1922, est un écrivain français, dont l’œuvre principale est la suite romanesque intitulée À la recherche du temps perdu, publiée de 1913 à 1927(source Wikipedia).

 

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